Le 14 mars 2019, le Parlement européen, le Conseil et la Commission européenne sont parvenus à un accord politique sur les règles définissant le fonctionnement de l’UE en tant que membre de l’Acte de Genève. L’Acte de Genève est un traité multilatéral pour la protection des indications géographiques géré par l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle.
Il existe différents labels de qualité dans l’UE, comme rappelé par la DG AGRI : « Les IG, AOP et IGP protègent le nom d’un produit, qui provient d’une région spécifique et suivent un processus de production traditionnel particulier. Cependant, il existe des différences entre les 3, liées principalement à la quantité de matières premières provenant de la région ou à la quantité de processus de production devant avoir lieu dans la région spécifique » :
- L’appellation d’origine protégée (AOP) est un label destiné aux produits ayant les liens les plus forts avec le lieu où ils sont fabriqués.
- L’indication géographique protégée (IGP) met l’accent sur la relation entre la région géographique spécifique et le nom du produit, là où une qualité, une réputation ou une autre caractéristique est essentiellement imputable à son origine géographique.
- L’indication géographique des boissons spiritueuses et des vins aromatisés (IG) protège le nom d’une boisson spiritueuse ou d’un vin aromatisé provenant d’un pays, d’une région ou d’une localité où la qualité, la réputation ou une autre caractéristique du produit est essentiellement imputable à son origine géographique.
Alors que les AOP bénéficiaient déjà d’un cadre de protection multilatéral au niveau international, seuls des accords bilatéraux existaient jusqu’à présent pour les indications géographiques.
L’Accord de Lisbonne concernant la protection des appellations d’origine et leur enregistrement international
Depuis 1958, l’Accord de Lisbonne protège les appellations d’origine au niveau international sous l’administration de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI). Sur les 29 parties contractantes de l’Accord de Lisbonne, sept sont des États membres de l’UE : Bulgarie, République tchèque, Slovaquie, France, Hongrie, Italie et Portugal. D’autres États, tels que la Grèce, la Roumanie et l’Espagne, ont signé l’accord mais ne l’ont jamais ratifié.
L’Accord de Lisbonne garanti aux appellations d’origine dans les pays contractants la même protection que dans leur pays d’origine. Il a également créé un registre international des appellations d’origine, géré par l’OMPI.
La protection des appellations d’origine au niveau international est cruciale pour l’UE. Selon les statistiques de l’OMPI, en 2016, 1060 produits étaient inscrits au registre international des appellations d’origine, dont 509 provenaient de France, 142 d’Italie, 76 de la République tchèque et 28 de Hongrie.
Une telle protection est également importante pour les produits de montagne car la mention facultative de qualité n’est pas exclusive. Ils peuvent ainsi bénéficier à la fois de la mention facultative de l’UE « produit de montagne » et du label « Appellation d’origine protégée ». D’autres produits de montagne bénéficient également d’une indication géographique et doivent donc être protégés au niveau international. Ces garanties de qualité préservent les sites de production traditionnels de produits de montagne et sont essentielles à la protection du patrimoine culinaire des montagnes. En outre, leur protection peut aider à mettre en place des systèmes alimentaires plus résilients et à atténuer les effets du changement climatique.
L’Acte de Genève, un champ plus large pour une meilleure protection ?
L’Acte de Genève de l’Accord de Lisbonne sur les appellations d’origine et les indications géographiques a été adopté en 2015. Les principales révisions consistent en un champ d’application plus large, car le nouvel acte inclut toutes les indications géographiques et ne sera plus limité aux appellations d’origine. Les pays dans lesquels il n’existe pas de distinction entre les deux ne seront pas obligés de créer une différenciation dans leur législation nationale ou régionale. En outre, l’Acte de Genève introduit la possibilité pour les organisations internationales, telles que l’Union Européenne, d’être parties contractantes, tandis que l’Arrangement de Lisbonne ne prévoit que l’adhésion d’États.
À travers son chapitre III, l’Acte de Genève protégera les appellations d’origine et les indications géographiques contre toute utilisation de leur nom pour un produit qui n’a pas obtenu l’approbation de l’étiquetage et qui ne répond pas aux critères du cahier des charges, ainsi que de toute autre pratique commerciale visant à induire le consommateur en erreur quant à la véritable provenance ou à la nature des produits. Cela les protégera également de toute imitation commerciale, même si elle est accompagnée de termes tels que « style », « genre », « type », « marque », « imitation », « méthode », « tel que produit », « similaire ».
En outre, les informations sur le lien entre les caractéristiques d’un produit et son origine géographique étaient facultatives dans l’Accord de Lisbonne. Désormais, en vertu de l’Acte de Genève, une appellation d’origine ou une indication géographique ne sera pas protégée dans une partie contractante si cette condition est obligatoire dans ce pays et que la demande n’y est pas conforme. Cette mesure pourrait ainsi renforcer la protection des indications géographiques et des produits de montagne qui en bénéficient.
L’Acte de Genève ne remplace aucunement la législation européenne protégeant les appellations d’origine et les indications géographiques. Il offre toutefois une nouvelle dimension internationale à leur protection, comme le souligne Phil Hogan, Commissaire européen à l’agriculture et au développement rural : « Grâce à cet accord politique, la protection des indications géographiques de l’UE peut être améliorée au niveau multilatéral. Il complètera la protection accordée au travers des accords bilatéraux qui protègent déjà les indications géographiques de l’UE dans le monde ».
Prochaines étapes
Suite à l’arrêt de la Cour de Justice de l’UE du 25 octobre 2017 dans l’affaire C-389/15 – Commission / Conseil, il est clair que l’Union Européenne aura la compétence exclusive sur la décision d’adhérer à l’Acte de Genève, dans la mesure où cela a des effets directs sur la politique commerciale et parce que la révision de l’Accord de Lisbonne visait à faciliter les négociations commerciales entre l’UE et des pays tiers.
Le projet de règlement adopté va maintenant faire l’objet d’une approbation formelle par le Parlement européen et le Conseil. Une fois l’approbation donnée, l’UE sera prête à adhérer officiellement à l’Acte de Genève. Ce dernier entrera en vigueur dès que cinq États ou organisations internationales l’auront ratifié.
29 mars 2019