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Quels sont les transferts de services écosystémiques entre les montagnes et les plaines ?

Une étude sur « La perspective transnationale des flux de services écosystémiques mondiaux et régionaux en provenance et à destination des régions de montagne » a récemment été publiée par Eurac Research – un centre de recherche italien, membre d’Euromontana. De nombreuses études ont déjà exploré le concept et la définition des services écosystémiques ; cependant, les chercheurs ont souligné l’absence de changement de politique, en raison d’une mauvaise compréhension des transferts de ces services écosystémiques entre différentes zones. L’étude vise donc à explorer les transferts de services écosystémiques dans les Alpes pour mieux comprendre les services rendus par les ressources naturelles des zones de montagne mais aussi pour aider les décideurs politiques dans leur gestion durable.

 

Les zones de montagne : principaux fournisseurs de services écosystémiques aux communautés des plaines

Les résultats de l’étude peuvent être résumés dans la figure ci-dessus, qui indique l’équilibre entre les zones de prestation de services et les zones de demande de services. Il montre clairement que les régions montagneuses alpines sont de grands pourvoyeurs d’eau douce, d’activités de plein air ainsi que de plantes et d’animaux symboliques spécifiques. Pour ces services écosystémiques, l’offre est beaucoup plus importante que la demande dans les zones de montagne ; cependant, étant donné qu’il existe une demande importante des zones de plaine environnantes ou même au niveau mondial, des transferts vers ces territoires doivent être effectués. Ces derniers peuvent être réalisés par des mécanismes très différents selon la nature des services en question. Alors que l’eau, par exemple, peut être transportée par camions ou par pipelines, les communautés des plaines ne peuvent bénéficier des activités de plein air de la montagne que si elles s’y rendent. En outre, l’offre de patrimoine naturel en provenance des zones de montagne, comme les espèces symboliques de montagne, ne peut renforcer et satisfaire la demande que si l’information est suffisamment diffusée.

Les zones de montagne offrent ainsi d’importants services écosystémiques, non seulement aux communautés de montagne, mais aussi aux habitants des plaines environnantes et à l’ensemble de la société. Par exemple, le lac de Constance, alimenté par les eaux de pluie et les eaux de fonte des Alpes, fournit 125 millions de mètres cubes d’eau par an, ce qui représente un tiers de la consommation mondiale d’eau en bouteille.

L’étude aide également à comprendre le profil des bénéficiaires des services écosystémiques de la montagne. Dans le domaine du tourisme, par exemple, les chercheurs montrent que les visiteurs des Dolomites viennent principalement d’Italie, d’Autriche et d’Allemagne, tandis que les Alpes du Nord en Autriche sont surtout visitées par des Européens venant de pays non alpins. Ces informations pourraient être importantes pour les décideurs politiques du tourisme et les acteurs en charge de la durabilité dans ce secteur. En effet, les données recueillies peuvent par exemple aider à concevoir des panneaux de prévention et d’information dans différentes langues pertinentes.

 

Remodeler les transferts de services écosystémiques pour une gestion plus durable des ressources naturelles

Dans l’ensemble, l’étude d’Eurac Research indique que les zones rurales et naturelles des régions de montagne sont des points névralgiques des services écosystémiques, alors que la forte demande de ces derniers provient principalement des zones urbaines des plaines. Compte tenu des tendances actuelles en matière d’urbanisation, on s’attend à ce que ces liens de demande et d’approvisionnement s’intensifient dans l’avenir.

Ainsi, les transferts devront peut-être être remodelés afin d’atteindre la durabilité, comme l’explique Uta Schirpke, l’une des auteures de l’étude : « Par exemple, les gens doivent se déplacer pour des activités récréatives de plein air, ce qui a beaucoup d’impacts négatifs sur l’environnement et la circulation. Ici, l’offre de transports publics pourrait être améliorés ou celle d’espaces de loisirs dans les zones urbaines pourrait être augmentée« .

Les services écosystémiques apportent également des intrants essentiels à d’autres secteurs, comme l’agriculture de montagne. Pour maintenir une agriculture de qualité dans les zones de montagne, « il est primordial de ne pas surexploiter les ressources naturelles des zones de montagne, mais de soutenir une utilisation durable. Cela peut se faire, par exemple, en valorisant des produits de haute qualité provenant des zones de montagne, ce qui maintient un revenu pour les agriculteurs ou l’artisanat et fournit aux habitants des zones urbaines des produits authentiques tout en renforçant le lien avec la nature« .

En mai 2019, la macro-région EUSALP a organisé une conférence à Bolzano pour explorer les différentes marques territoriales de la région alpine. Outre la mention facultative européenne de qualité « produit de montagne », le rôle des marques régionales dans la promotion de la valeur ajoutée des zones de montagne a été mis en évidence par les acteurs locaux. L’image de marque devient d’autant plus importante qu’un nombre croissant de touristes non européens s’intéressent aux produits locaux dans les montagnes européennes.

 

Quelles recommendations pour les décideurs politiques ?

L’étude d’Eurac Research apporte une contribution majeure à la compréhension des transferts de services écosystémiques entre différentes zones géographiques. La diversité des services écosystémiques et des ressources naturelles concernés ouvre la voie au changement dans différents domaines politiques. Les secteurs de l’environnement, de la sylviculture, de l’agriculture, du tourisme et des transports, entre autres, pourraient en effet jouer un rôle majeur dans la gestion durable des ressources naturelles des montagnes.

Le remodelage des transferts de services écosystémiques ainsi que la gestion durable des ressources naturelles des zones de montagne dépendent des décideurs politiques. Comme l’a rappelé Uta Schirpke, elle est cruciale « non seulement pour la population locale, mais aussi pour de nombreuses personnes en dehors des Alpes, qui dépendent des services fournis par les régions de montagne« .

Afin d’accroître la visibilité de l’étude, Eurac Research a diffusé ses résultats dans les médias et a présenté l’étude lors de divers ateliers et conférences. Malgré les efforts d’acteurs internationaux tels que la Convention alpine et la CIPRA par exemple, les chercheurs regrettent que les intérêts économiques à court terme l’emportent parfois sur les objectifs de durabilité à long terme. Ils reconnaissent par des efforts et des initiatives importants dans l’espace alpin, par exemple dans le domaine de la gestion de l’eau et des forêts.

 

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