Dans le cadre de l’Année Européenne de la Jeunesse, la Commission européenne travaille actuellement sur une Communication sur la fuite des cerveaux et sur la manière d’atténuer les défis liés au déclin démographique en utilisant les outils et les fonds de la Politique de Cohésion.
Euromontana souhaite porter la voix des zones de montagne dans ce débat et a donc contribué à la consultation publique de la Commission européenne afin de fournir un aperçu des défis démographiques de nos régions et quelques recommandations.
Le manque d’emplois diversifiés et qualifiés entraîne la fuite des cerveaux dans les zones de montagne
De nombreuses zones de montagne en Europe connaissent un déclin démographique dû à un manque d’attractivité. Dans ces zones, le vieillissement, l’exode des jeunes, la fuite des cerveaux et parfois le dépeuplement entraînent un cercle vicieux de perte aggravée d’attractivité et de services.
Le rapport de 2022 d’Euromontana « Être jeune en montagne » et d’autres études nationales ou régionales récentes sur les flux de population en montagne démontrent que les jeunes veulent rester dans les zones de montagne, mais qu’ils ont du mal à y trouver des emplois correspondant à leur formation. De fait, l’absence de diversification économique et le manque de postes qualifiés sont les principaux moteurs de la fuite des cerveaux dans les territoires de montagne.
Utiliser la Politique de Cohésion pour inverser la tendance
Euromontana se félicite de l’intention de la Commission européenne de limiter la fuite des cerveaux au moyen de la Politique de Cohésion de l’UE, qui canalise les fonds à disposition des territoires pour répondre à leurs défis spécifiques.
Cependant, Euromontana alerte sur le fait que les stratégies de lutte contre la fuite des cerveaux ne doivent pas uniquement reposer sur les stratégies de spécialisation intelligente des régions. Bien que certaines d’entre elles se soient avérées bénéfiques pour les régions de montagne, nombre de ces stratégies sont encore axées sur des secteurs traditionnels tels que la production agroalimentaire et le tourisme et ne contribuent donc pas suffisamment à la diversification de l’économie locale. De plus, ces stratégies impliquent souvent des acteurs clés des grandes villes, qui ont les ressources nécessaires pour concevoir et contribuer à une stratégie S3 ; par conséquent, ces stratégies ne bénéficient souvent pas aux régions les plus éloignées, qui sont souvent les plus affectées par la fuite des cerveaux.
Euromontana invite donc les régions à utiliser les fonds de la Politique de Cohésion pour :
- Impulser la diversification de l’économie locale, en favorisant l’émergence de nouveaux secteurs porteurs, s’appuyant sur les ressources des montagnes, comme la bioéconomie, l’économie circulaire ou l’énergie durable.
- Soutenir l’entrepreneuriat rural par le biais de dispositifs de soutien spécifiques fournissant des conseils sur les démarches administratives, afin de créer de nouveaux emplois dans les régions. Le Fonds Social Européen serait particulièrement utile dans ce cas.
- Construire des stratégies d’attractivité territoriale pour attirer et faire revenir les jeunes diplômés et les familles qui ont quitté leur région pour étudier ou travailler ailleurs.
- Multiplier les programmes à succès de stages en milieu rural afin de changer les mentalités sur la vie et le travail dans les zones rurales et de promouvoir les opportunités d’emploi existantes.
- Évaluer le potentiel du télétravail dans les régions et élaborer des stratégies durables pour attirer les travailleurs à distance potentiels.
Au-delà de la politique de cohésion, Euromontana plaide également pour :
- Davantage d’échanges de bonnes pratiques entre les régions confrontées à la fuite des cerveaux afin d’encourager la réplication de stratégies fructueuses. Ces échanges pourraient avoir lieu dans le cadre d’un projet Interreg Europe mais aussi au sein de la communauté du Pacte Rural.
- Plus de données disponibles au niveau infra régional. L’analyse des tendances démographiques en dessous du niveau NUTS3 est essentielle pour appréhender réellement les flux de population entre les zones urbaines, semi-urbaines et rurales d’une région. Ces données pourraient être fournies par Eurostat et le nouvel Observatoire Rural.
- Une analyse de l’impact de la COVID-19 sur la démographie rurale. Jusqu’à présent, il n’y a pas de preuve que la pandémie a changé les mentalités sur les zones rurales et a eu un impact concret et stable sur la démographie rurale et l’attractivité territoriale. Une telle analyse pourrait être fournie par Eurostat, le Centre Commun de Recherche ou par certains projets Horizon Europe.
Ces recommandations ont été partagées avec la Commission européenne dans notre document de position « Lutter contre la fuite des cerveaux dans les zones de montagne : des outils pour inverser la tendance et renforcer l’attractivité des territoires » (en anglais). Le document comprend également des exemples de bonnes pratiques déjà mises en œuvre dans les régions, comme le programme Desafio d’Erasmus rural dans la région d’Aragon (Espagne), la campagne Restez à la campagne – ça paye (Pologne) ou l’initiative d’espaces de co-working de MiaEngiadina (Suisse).
L’attractivité des montagnes fera l’objet d’un débat plus approfondi lors des XIIèmes Assises Européennes de la Montagne sur le thème « Smart Mountains : comment rendre nos territoires attractifs et tournés vers l’avenir ? », qui se tiendront les 25-26-27 octobre 2022 dans le Parc Naturel et la Réserve de Biosphère de Sila, en Italie.
23 juin 2022