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Pendant ce temps en Norvège : la crise du coronavirus met à l’ordre du jour la préparation aux situations d’urgence dans les municipalités rurales de montagne

Par Tor Arnesen, chercheur au Eastern Norway Research Institute

Environ la moitié des Norvégiens ont accès à une résidence secondaire, et beaucoup de gens partagent leur temps et leur vie entre leur appartement en ville et leur chalet dans les zones rurales de montagne. Lorsque la crise du COVID-19 a frappé en mars, le gouvernement norvégien a ordonné, par une loi d’urgence, aux ménages disposant d’une résidence secondaire de quitter les montagnes et de retourner en ville. La raison : la préparation aux situations d’urgence dans les municipalités rurales de montagne qui accueillent des résidences secondaires n’est pas en mesure de faire face à autant de personnes que celles qui se trouvent de facto dans leur communauté lorsque l’on comptabilise les résidents secondaires, ou occasionnels.

Et elles ne le sont pas, ni dans des circonstances normales, ni dans des situations extraordinaires comme celle-ci. Mais n’est-ce pas là l’essence même de la préparation aux situations d’urgence, qui consiste à faire face à des situations extraordinaires ? Et à quelles conditions l’interdiction de se rendre dans sa résidence secondaire devrait-elle être acceptée comme un instrument politique normal de préparation aux situations d’urgence ?

Tor Arnesen est chercheur au Eastern Norway Research Institute et membre du Comité Directeur d’Euromontana. Il nous parle des défis que représente le fait de demander aux résidents non permanents de quitter l’endroit qu’ils appellent « leur maison de montagne ». T. Arnesen plaide pour que ce mode de vie et cette structure sociale de maisons multiples soient mis à l’ordre du jour afin de garantir que la préparation aux situations d’urgence dans les zones de montagne soit renforcée pour les crises futures – également au profit des municipalités rurales de montagne. Les zones rurales de montagne pourraient être considérées comme une ressource dans une situation de pandémie, mais comment devrions-nous organiser la société pour exploiter cette ressource potentielle ?

 

Commençons par le commencement : un effort public commun pour combattre le COVID-19 exige des sacrifices et, pendant une période d’un mois, être obligé par une loi d’urgence de retourner en ville et quitter les chalets est un prix très bas à payer cette fois-ci. C’est acceptable parce que la situation a pris la société au dépourvu. La question la plus intéressante est de savoir ce que cette politique extraordinaire a révélé. Ce qui frappe, c’est qu’une fois la crise passée, nous devons fournir aux municipalités de montagne concernées les outils et les ressources qui nous permettraient d’être mieux préparés lorsque la prochaine crise similaire se produira – parce que ce sera le cas.

Au cours des trois dernières décennies, l’Eastern Norway Research Institute de l’Université des Sciences Appliquées de Norvège Intérieure a étudié les résidences secondaires en tant que phénomène social ou tendance ayant fondamentalement introduit un nouveau type d’organisation de la vie des ménages. Les fonctions domestiques sont réparties sur plus d’une maison. Les ménages circulent entre la vie quotidienne en ville et la vie récréative du week-end et des vacances dans l’arrière-pays montagneux – ils gèrent un foyer dans plusieurs logements.

 

Retour à la ville

La pandémie de coronavirus a clairement révélé cette situation problématique, par exemple lorsque les autorités doivent recourir par la loi à une interdiction temporaire de séjour dans les résidences secondaire. Cependant, il s’agit clairement d’une mesure à court terme – bien que « tolérable » en cette période de gestion de crise et compte tenu de l’élément de surprise face à une situation grave et non anticipée. La loi a été respectée. Les familles sont rentrées en ville, même si les villes sont les « épicentres » de la pandémie, tandis que la « sécurité en montagne » a été assurée avec très peu de cas d’infection. Même à l’Institut Norvégien de Santé Publique, les professionnels ont déclaré que l’interdiction n’avait rien à voir avec le contrôle de l’infection, et qu’il serait bon de laisser les gens quitter les villes. L’interdiction est venue comme une réponse politique après que plusieurs maires de municipalités rurales de montagne aient confronté le gouvernement avec leur forte inquiétude: leur préparation n’était pas conçue pour prendre soin de leur résidents secondaires.

Une information mineure mais vitale pour saisir le contexte spatial des délibérations liées au risque d’infection par rapport à la capacité de préparation aux situations d’urgence disponible : Le triangle. Un peu simplifié : les ménages circulent de la ville vers l’arrière-pays montagneux pour rejoindre leur résidences secondaires situées dans des agglomérations bien en dehors des petites villes et villages traditionnels. La circulation entre les agglomérations de résidences secondaires et les villages et petites villes de montagne a sa propre logique, principalement un passage en voiture, pour l’approvisionnement en nourriture et certains services.

Il y a donc un débat au lendemain de cette crise, une crise qui montre clairement que la société a été prise au dépourvu sur la question de la circulation entre les agglomérations de résidences secondaires et les villages et petites villes de montagne. Pourquoi aborder ce problème dans un contexte de pandémie? Le souci n’est pas d’adapter la société à ce qui pourrait être perçu comme un mode de vie luxueux et de céder à une consommation non durable par les personnes aisées pour profiter de leur mode de vie privilégié.

 

Avantages pour la société rurale et mesure de sécurité

Il y a cependant deux préoccupations plus importantes à cet égard. Le développement de résidences secondaires dans les municipalités rurales de montagne est une ressource qui devrait profiter aux sociétés rurales elles-mêmes, en exigeant un renforcement de la prévention par le gouvernement. En outre, il existe une « sécurité en montagne » dans de nombreuses situations où les villes sont particulièrement vulnérables aux crises, les pandémies n’étant que l’une d’entre elles. Et comme la crise du coronavirus a éveillé le monde à une nouvelle compréhension de la prévention, il est important de développer de nouvelles politiques de prévention pour mieux exploiter le potentiel de la « sécurité en montagne ».

 

Infrastructures publiques

En fin de compte, ce n’est pas une solution viable que d’interdire aux ménages de se rendre dans leur propre maison, même s’il peut s’agir d’une résidence secondaire, et il n’est pas non plus judicieux que les municipalités rurales leur demandent de retourner en ville lorsqu’une crise comme celle-ci réapparaîtra – comme ce sera le cas. Le défi de la recherche et la tâche politique consistent à trouver comment nous pouvons développer l’infrastructure publique de manière à renforcer à la fois les zones rurales et les villes.

En ce qui concerne le problème des soins de santé d’urgence, nous devons reconnaître que de nombreux Norvégiens partagent désormais leur vie entre leur maison et leur chalet – la seconde maison remplit des fonctions qui font partie intégrante d’un foyer.

 

Renforcer le personnel paramédical dans les zones de montagne

Une solution possible est de renforcer considérablement l’offre de soins paramédicaux. Cela s’applique notamment aux services d’ambulance, qu’ils soient terrestres ou aériens, qui deviennent aujourd’hui une offre médicale de pointe où le patient peut recevoir un traitement vital et hautement qualifié de premier secours tout en étant transporté vers un traitement hospitalier plus complet.

Les municipalités de montagne ou les zones comportant de nombreuses résidences secondaires en bénéficient. La plupart d’entre elles sont des municipalités rurales qui se trouvent dans un rayon de deux à trois heures de voiture de nos centres urbains. L’amélioration des services paramédicaux sera bien sûr également très bénéfique pour l’ensemble de la communauté des municipalités de montagne – surtout à l’heure actuelle, où nous centralisons les services hospitaliers.

Un renforcement significatif des services paramédicaux sera coûteux, mais c’est une conséquence de la structure de résidence secondaire que nous avons développée depuis la fin des années 1980. Les municipalités de montagne doivent maintenant comprendre qu’après A vient B ; après le développement, l’infrastructure publique doit suivre. C’est le modus operandi de la planification sociale et c’est une responsabilité du gouvernement central.

La Norvège doit en faire une tâche politique qui devrait de préférence être abordée avant qu’une autre crise n’arrive. La solution qui consiste à demander aux gens de rentrer chez eux alors qu’ils se trouvent effectivement dans leur propre résidence – principale ou secondaire – ne devrait peut-être pas avoir d’avenir.

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