Au cours de la Semaine européenne des villes et des régions 2018, organisée à Bruxelles du 9 au 11 octobre 2018, une session a été consacrée à la manière dont les solutions numériques peuvent aider les administrations publiques à stimuler la croissance et à réduire les obstacles et les charges administratives dans les régions transfrontalières européennes, qui sont souvent montagneuses. La session a été organisée un an après l’adoption par la Commission de sa communication intitulée « Stimuler la croissance et la cohésion dans les régions frontalières de l’UE », qui mettait fortement l’accent sur la cyber-gouvernance, montrant ainsi l’engagement soutenu de la Commission Européenne sur ce sujet.
La transformation numérique de la gouvernance locale peut faciliter la vie des individus et des entreprises dans les régions frontalières. En effet, les échanges transfrontaliers de données réduiront les charges administratives pour les bénéficiaires et faciliteront la mobilité. L’objectif d’une cyberadministration efficace est également d’accroître la transparence et d’encourager une plus grande participation des citoyens à la vie politique.
Le cadre juridique de la cybergouvernance
Dans le cadre de sa stratégie pour le marché unique numérique, la CE souhaite prendre des mesures concrètes pour le développement des services publics numériques transfrontaliers. En effet, dans le marché intérieur de l’UE, les citoyens peuvent circuler librement – que ce soit pour le travail ou pour des raisons privées – et ils doivent donc aussi pouvoir traiter facilement avec les services publics en dehors de leur pays d’origine.
Le plan d’action européen pour l’administration en ligne 2016-2020 reconnaît cette évolution comme une opportunité et propose 20 actions pour rendre les administrations publiques et les institutions publiques de l’Union européenne « ouvertes, efficaces et inclusives, fournissant des services publics numériques sans frontières, personnalisés, conviviaux et de bout en bout, à tous les citoyens et entreprises de l’UE ». L’une des principales priorités politiques du plan d’action est de moderniser les administrations publiques en utilisant par exemple l’identité électronique (eID) et les services de confiance électroniques (signatures électroniques, sceaux électroniques, horodatage, service de livraison électronique et authentification de sites web) pour les transactions électroniques transfrontalières.
Le règlement (CE) n° 910/2014 relatif à l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur (règlement eIDAS), adopté en 2014, constitue une étape importante dans ce domaine. Le règlement eIDAS garantit que les citoyens et les entreprises peuvent utiliser leurs propres systèmes nationaux d’identification électronique (eID) pour accéder aux services publics dans d’autres pays de l’UE, où l’identification électronique est disponible. Le règlement eIDAS garantit également que les services fiduciaires électroniques fonctionnent au-delà des frontières et ont le même statut juridique que les processus traditionnels sur papier. En fait, la reconnaissance mutuelle des eID entre les États membres réglementée par eIDAS a débuté très récemment, le 29 septembre 2018, bien qu’elle ne soit fonctionnelle qu’en Italie et en Allemagne à ce jour.
Application utile en montagnes
Les intervenants de la session ont présenté des applications utiles pour les zones de montagne.
Premièrement, dans le domaine de l’agriculture, le règlement eIDAS permettra aux agriculteurs de déclarer leurs surfaces agricoles de l’autre côté de la frontière, dans le système des services agricoles étrangers, avec leur propre eID. En effet, les animaux ne se cantonnent pas derrière frontières nationales, en particulier dans les alpages, et cette évolution permettra aux agriculteurs de se conformer au droit communautaire (en déclarant l’utilisation des terres) tout en bénéficiant du soutien de la PAC. Cet exemple est actuellement mis en œuvre aux frontières germano-néerlandaise et néerlando-belge.
Deuxièmement, en ce qui concerne le secteur de la santé, le règlement eIDAS facilitera l’accès aux centres de soins de santé les plus proches et garantira, par exemple, que les bébés nés de l’autre côté de la frontière pour des raisons de proximité soient toujours enregistrés directement dans leur système national, ce qui simplifiera leur inscription simultanée dans les systèmes d’état civil, de sécurité sociale et d’imposition. Cet exemple est mis en œuvre à la frontière germano-autrichienne.
Enfin, dans le domaine des services, une carte d’euro-citoyen (également reconnue comme pièce d’identité au même titre qu’une carte d’étudiant, par exemple) est testée à la frontière hispano-portugaise pour donner accès aux mêmes services aux citoyens vivant des deux côtés de la frontière dans une même ville (services administratifs, bibliothèques, équipements sportifs, …). Les services offerts par cette carte comprendront bientôt l’accès aux transports en commun et le paiement sans contact.
En conclusion
Les intervenants de l’atelier ont identifié trois principaux obstacles à la mise en œuvre des services transfrontaliers : la sémantique, la confiance et la cybersécurité. Toutefois, une volonté politique suffisante peut permettre de surmonter ces obstacles et la proposition de budget pour la prochaine période de programmation montre déjà un fort soutien de la CE. En effet, le programme « Connecting Europe Facility » (programme de financement des infrastructures transeuropéennes Transport – Energie – Télécommunications) a bénéficié d’une augmentation de 40% dans le budget européen provisionnel, la dotation totale s’élevant désormais à 42,3 milliards d’euros. Bien que la composante numérique ne représente que 3 milliards d’euros, cela constitue une augmentation de 188% par rapport à la période de programmation 2014-2020.
Vous trouverez d’autres bonnes pratiques à ce sujet sur la plateforme « Boosting EU border regions » mise en place par la DG REGIO.
5 novembre 2018