Euromontana a participé cette année au 4ème Parlement Rural Européen, organisé par ELARD et qui a eu lieu à Candas, Espagne, du 6 au 9 octobre 2019. Le Parlement Rural Européen est une campagne à long terme visant à exprimer la voix des populations rurales en Europe et à promouvoir l’entraide et l’action des populations rurales, en partenariat avec la société civile et les gouvernements. Pour l’édition de cette année, organisée au cœur des montagnes asturiennes, Euromontana a organisé un atelier sur « Comment gouverner intelligemment en montagne« , animé par Laura Gascon Herrero, de la Province de Teruel et membre du Comité Directeur d’Euromontana, et Blandine Camus, Policy & Communication Officer chez Euromontana.
Gouvernance intégrée dans les zones de montagne – expériences de terrain
La « smart governance » implique une approche intégrée du développement territorial et un processus de co-construction entre les institutions publiques, les organisations privées et la société civile et contribue à construire une stratégie à long terme adaptée aux besoins spécifiques d’un territoire. Loin de se limiter à l’utilisation des outils numériques pour impliquer les communautés locales, la gouvernance intégrée peut utiliser différentes ressources, des TIC à l’innovation sociale, et être appliquée à différentes échelles territoriales.
L’utilisation de modèles de gouvernance intégrée est particulièrement appropriée dans les zones de montagne, où les contraintes naturelles imposent de mettre en œuvre des politiques de développement territorial à l’échelle la plus pertinente pour mieux répondre aux besoins spécifiques du territoire. De plus, la gouvernance intégrée joue un rôle important dans nos régions, où des conflits entre différents secteurs ou intérêts économiques peuvent parfois surgir. L’expérience montre que des modèles de gouvernance innovants peuvent par exemple aider à combiner les activités touristiques et la protection des espaces naturels, les activités de sports d’hiver et la lutte contre le changement climatique ou plus généralement à résoudre les problèmes entre les communautés locales et les touristes, les agriculteurs et les environnementalistes par exemple.
Différents exemples européens ont été présentés au cours de l’atelier, tels que les Comités de Massif nouvellement créés en Roumanie, qui permettront d’identifier les besoins des Massifs et de construire des politiques ciblées à l’échelle territoriale la plus pertinente. Composés à la fois de représentants des collectivités locales et régionales et d’acteurs de différents secteurs économiques, les Comités de Massif apporteront leur expertise sur les besoins des zones de montagne. Les recommandations seront partagées avec le Conseil National de la Montagne, où les Présidents des 9 Comités du Massif rencontreront les représentants des différents ministères concernés.
Un autre exemple est la boîte à outils produite par le projet Espace Alpin GaYa – Gouvernance et Jeunesse dans les Alpes. Ce projet a en effet débouché sur différents outils à l’usage des décideurs politiques pour mieux inclure les jeunes dans les politiques publiques et mieux les impliquer dans le processus d’élaboration des politiques. En augmentant la participation démocratique des jeunes alpins, l’objectif était également de mieux répondre à leurs besoins et de leur permettre de se sentir pleinement intégrés dans leur territoire.
La participation du public est également l’outil clé du Parlement de la Montagne de la Région Occitanie, France. Créé en 2018, le Parlement de la Montagne vise à accroître la participation des citoyens dans les politiques publiques et à élaborer des stratégies collectives pour le développement durable de la région. Par le biais d’une plateforme en ligne, de sessions plénières et de groupes de travail, les communautés locales de montagne sont invitées à intervenir et à utiliser leur expertise locale pour établir des recommandations. Il faut également noter que ce modèle de gouvernance, sans effet contraignant entre le Parlement de la Montagne et le Conseil Régional, a été mis en place pour éviter toute interférence avec les Comités de Massif français.
Enfin, les participants ont été introduits à MedStrategy, un projet MED de l’UE développé pour construire de meilleurs modèles de gouvernance pour la création de stratégies de durabilité dans les zones méditerranéennes. Cela s’est fait par la définition d’objectifs communs et le développement d’approches intégrées entre les décideurs politiques locaux et les communautés locales. Sur cette base, la Province de Teruel, en Espagne, par exemple, a développé une stratégie pour réintroduire des activités pastorales dans la région. La même approche co-constructive et intégrée a conduit la Région de Crète à adopter une stratégie de durabilité dans la production agroalimentaire.
Comment mieux encourager une gouvernance plus intégrée dans les zones de montagne ?
Les participants à l’atelier ont souligné la nécessité d’un plus grand nombre d’initiatives de ce type, pour assurer une meilleure prise en compte des besoins des territoires à l’échelle territoriale la plus pertinente. Ils ont toutefois souligné le manque de connaissances des communautés locales sur les différents niveaux de législation et ont insisté sur la nécessité d’intensifier les activités de formation et de renforcement des capacités dans les zones de montagne.
En outre, les frontières administratives ont été identifiées comme une barrière possible pour les zones de montagne. Dans certains cas, il a été reconnu qu’il était plus efficace de construire des stratégies de développement au niveau du massif plutôt qu’au niveau du comté ou de la région. Les zones de montagne sont façonnées par des frontières naturelles, ce qui implique des contraintes, des besoins et des potentiels naturels et géographiques spécifiques. A l’occasion de la Semaine Européenne des Régions et des Villes, ce thème a été particulièrement bien illustré par Nathalie Prouheze, de l’Autorité de Gestion du Massif Central, qui regroupe 22 départements et représente 42% des zones de montagne françaises. Compte tenu des défis communs et des spécificités de ce massif, tels que le dépeuplement, le manque de main-d’œuvre qualifiée et le manque d’attractivité, construire les stratégies et les investissements à l’échelle du massif a été l’option la plus efficace.
Ainsi, un développement territorial efficace dans les zones de montagne repose aussi sur une gouvernance intelligemment intégrée, impliquant les communautés locales, les experts et les politiciens pour réfléchir ensemble aux meilleurs outils pour relever leurs défis spécifiques. Des citoyens plus proactifs n’implique pas seulement une démocratie plus saine, mais aussi des politiques plus efficaces ; par conséquent, une gouvernance intégrée dans les zones de montagne devrait également impliquer une meilleure coordination des décideurs politiques et des experts. Une approche plus efficace du développement des zones de montagne peut être encouragée par une planification stratégique des investissements, par exemple par le biais des fonds de cohésion et de développement rural et par des approches ascendantes et descendantes telles que DLAD et ITI.
Pour plus d’informations sur les exemples présentés, veuillez consulter la présentation de l’atelier ou nous contacter. Lisez aussi la Déclaration de Candás, du Parlement Rural Européen 2019 !
26 novembre 2019